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Autodérision et démystification féminines

Posté : 09 juin 2021 17:50
par BILL
Je me trouve dans la nature en présence d’un groupe de femmes qui exposent, sans aucune intention exhibitionniste, des parties de leur corps les plus inattendues. Elles le font dans le but de détourner l’attention de ces parties traditionnellement et érotiquement valorisées par le regard masculin notamment et comme pour se moquer du caractère fétichiste de cette perception. Par exemple, l’une d’entre elles montre un endroit de sa hanche de quelques centimètres carrés qui fait un peu plus saillie (l’épine iliaque), puis une sorte de mamelon de la même couleur que la peau mais situé sur une autre partie du torse que la poitrine, etc. et tout cela gaiement avec une sorte d’autodérision.



Cela me semble être l’expression imagée de ce que je pense à propos de la perception du féminin par l’homme en général et par bon nombre de femmes elles-mêmes, en raison des conditionnements reçus. Cela revient à démystifier tous les attributs fétichistes projetés sur le physique féminin, ceci bien entendu dans un cadre qui peut varier d’une culture à l’autre, puisque, selon l’époque et le lieu, le regard masculin découpe le corps féminin en valorisant telle ou telle partie plutôt que telle autre. Les femmes comme les hommes gagneraient, je crois, à s’affranchir de ces préjugés qui mènent à percevoir la femme d’abord comme objet sexuel. Et les femmes de mon rêve pour récuser ce fétichisme ont l’air de dire : « Et pourquoi pas ceci, pourquoi pas cela, pendant qu’on y est… ». Cela ressemble, en plus restreint mais non moins significatif, à ce que, dans le film de Jean Luc Godard, Le Mépris, Camille (Brigitte Bardot) dit à Paul (Michel Piccoli) (« Et mes chevilles tu les aimes ? …» Pieds, chevilles, genoux, cuisses, etc, tout y passe ou presque. Une longue et désolante énumération des parties corporelles (comme si l’amour se découpait en morceaux à la manière de la carte du bœuf (joue, collier, bavette, poitrine, paleron, onglet, aloyau, etc). On sait que dans ce film la confusion de l’amour avec seulement le désir érotique est une méprise qui engendre le mépris, celui de la femme pour un homme qui l’exploite comme il exploite son corps.

Dans mon rêve on trouve, sous une autre forme, la même contestation de la femme-objet ainsi fétichisée. Elles traduisent une volonté d’être perçues d’abord comme êtres humains à part entière et sur des critères qui ne soient pas exclusivement instinctuels, (physique, sexe et fonction reproductrice prioritaires), ce qui veut dire que, tout en tenant compte de sa liberté de choix (mais est-ce vraiment un choix si conditionnement culturel il y a ? ) une femme ne devrait pas être perçue ni se percevoir elle-même en premier lieu sous l’angle de l’attraction sexuelle, de la séduction et de la fonction reproductrice, mais avant tout comme ce qu’elle est non moins essentiellement, c'est à dire un être de capacité intellectuelle, inventive, créative, entreprenante, aimante et spirituelle. Mais attention ! Je ne veux pas dire par là que la femme, pas plus que l’homme d’ailleurs, devraient se comporter come des êtres angéliques, au risque de justifier la pensée de Pascal « L'homme n'est ni ange, ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l'ange fait la bête » :I: . En conséquence, puisque donc nous ne sommes ni ange ni bête, il nous faut donner la priorité à ce qui est spécifiquement humain et même si nous avons une part d’animalité à assumer, cela gagnerait à l’être de manière humaine et non bestiale, tout à l’opposé de ce qui se passe par exemple dans la drague courante de bas étage ; inutile de faire un dessin…

D'ailleurs, cette prévalence de l’humain dans la perception réciproque des hommes et des femmes n’exclut pas du tout, à mon sens, les sentiments amoureux, les relations affectives ni le désir mais il y a une façon de vivre les choses, un ordre de priorité et une échelle de valeurs qui changent tout. Cela n’abolit pas non plus la courtoisie ou le romantisme ni même « les jeux de l’amour et du hasard » mais en les débarrassant des préjugés archaïques de captation, domination, manipulation, utilisation, d’un sexe par l’autre, car ce sont des formes perverses de relation malheureusement assez répandues. Soit on continue à mettre notre animalité, en premier plan et les problèmes du couple ne seront jamais réglés, soit on humanise nos désirs, nos actes et nos comportements et alors tout peut changer sur le plan relationnel. Le problème est qu’il n’y a pas, à mon humble avis, beaucoup d’hommes ou de femmes vraiment prêt(e)s à changer leur manière de se percevoir soi même et de percevoir l’autre, dans la mesure où chacun(e) croit, même en étant de bonne foi, que ses pulsions, ses visions et ses visées sont naturels et normaux alors qu’ils sont largement façonnés par la tradition, l’habitude, l’éducation institutionnelle ou celle « de la rue » et donc chargés de préjugés sexistes qui faussent tout. C’est très difficile, les habitudes ont une force d’inertie inouïe !
Votre regard toujours bienvenu, Bill

Re: Autodérision et démystification féminines

Posté : 20 juin 2021 15:45
par LFS
Bill bonjour et Désolée de mon absence...

J'avais tout prévu pour que mon escapade passe inaperçue, mais hélas, c'était sans compter les interruptions de réseaux à Belle-Ile voire plus. Bref! Je n'ai rien pu faire depuis là-bas mis à part prendre le soleil. Avant mon arrivée, les bellilois ont même connu une mésaventure à savoir ne plus pouvoir payer au caisses et encore mois retirer de l'argent. Étrange cette île, mais très jolie.

Je suis de retour, donc votre rêve ->

Les femmes comme les hommes gagneraient, je crois, à s’affranchir de ces préjugés
et certains se sont rendus aveugles d'avoir osé regarder le haut du cheville avec trop d'insistance. Le culpabilité le tenaillant, il a préféré ne plus rien voir... Cf Freud / Scopophilie.

Comme c'est vous qui rêvez de cette problématique, la question est : Avez-vous un souvenir dans lequel vous avez été dans cette situation - voir un bout d'une autre alors que la religion ou l'éducation le réprouvait et qui aurait laissé des traces d'une culpabilité inutile (inutile, vous le savez intellectuellement mais votre subconscient profond l'a-r-il imprimé ? ) -

A demain et encore mes excuses
LF

Re: Autodérision et démystification féminines

Posté : 21 juin 2021 12:50
par BILL
Pour la cheville, non, je ne crois pas, à moins que cela soit profondément enfoui. La pulsion scopique dont parle Freud est une sorte de prise de possession jouissive par le regard. Elle me parait avoir, avant toute sublimation, quelque chose d’un peu sadique à cause de cet élément possessif qu’il lui attribue. Sur ce point je suis entièrement d’accord avec lui car le regard et pas seulement chez l’être humain mais chez la plupart des êtres vivants, est d’abord une façon de cibler une proie que ce soit chez les reptiles, les oiseaux ou les mammifères. Chez l’homme cette pulsion prédatrice est restée, tout en se complexifiant et le regard est devenu une façon de « prendre » du plaisir, une sorte de toucher virtuel comme on dit : « caresser du regard ».
Si l'on suit toujours Freud, on peut comprendre que la projection oculaire, puisse être jouissive en dehors même de la vision des zones érogènes traditionnelles, encore que là l’aspect culturel module beaucoup les choses.. Maintenant si l’on se place sur le plan esthétique, les choses sont un peu différentes quoi que… Les artistes plasticiens ou cinéastes peuvent mettre en valeur des parties du corps féminin (ou masculin) et privilégier certains aspects inattendus pour en tirer matière à plaisir esthétique. Cependant on a élargi le sens que Freud a donné à ce terme en l’appliquant à d’autres objets que le corps. Pour le corps, il est intéressant de consulter l’article de Wikipédia « Zone érogène » au paragraphe « Localisation et érogénéité » sur le tableau « Évaluation des zones érogènes (par ordre décroissant ») je note avec un certain amusement (car on pourrait en faire tout un poème humoristique), que les parties du corps les moins érogènes susceptibles donc d’un regard scopique au sens freudien, sont, par ordre décroissant : les mollets, le menton, les chevilles (nous retrouvons là l’objet du délit) puis viennent les rotules, les tibias, le nez, et enfin, petit dernier : le coude. Chacun pourra imaginer comment le regard peut érotiser ces parties laissées-pour-compte…mais après tout on peut érotiser tout ce que l’on veut jusqu’au fétichisme
« Ah que j’aime ton mollet Lola
Ta rotule et tes coudes précieux »….
Je ne fais qu’esquisser une chanson scopique…

Les productions oniriques sont au repos en ce moment, il y a des rythmes. A bientôt, Bill

Re: Autodérision et démystification féminines

Posté : 22 juin 2021 11:29
par LFS
« Ah que j’aime ton mollet Lola
Ta rotule et tes coudes précieux »….
Hilarant !.... et poétique :l6

Oui tout ce que vous dites est juste, je rappelle que du temps de Freud à l'heure où les religieux parlaient de possession quand lui parlait d'hystérie et de guérison possible, les femmes dans la vrai vie (et non dans les tableaux de maîtres) étaient toutes recouvertes d'une superposition de tissu et qu'entrevoir une cheville était considéré comme un péché.
Ha ces religieux nous ont bien labouré le cerveau.

Passons, ces interdits laissent encore des traces aujourd'hui malgré le passage des années -70 pendant lesquelles on a pu voir le ventre de ces demoiselles l'air entre un bustier et le haut d'un jean à pattes d'eph. ::p

Je suis ravie de vous retrouver après cette absence

LF

Re: Autodérision et démystification féminines

Posté : 22 juin 2021 16:51
par BILL
Oui, LFS, votre rappel sur l'époque passée est important. Que d'interdits malvenus ! Mais il y en a encore beaucoup dans le monde et c'est toujours une redite de Molière "Cachez ce sein que je ne saurais voir" ;) . :grin:
A plus tard Bill

Re: Autodérision et démystification féminines

Posté : 23 juin 2021 10:11
par LFS
Exactement, l'humanité avance lentement et pas toujours sûrement ::p